Editions Albin Michel 2003
Alors qu’il assiste, impuissant et atterré, à la bataille de Solferino où, par milliers, agonisent soldats français, italiens et autrichiens, Henry Dunant a une soudaine révélation. De celles qui permettent aux utopies de devenir réalité : il faut créer une organisation internationale qui se chargera de soulager la souffrance humaine où qu’elle se trouve et quels que soient les belligérants. En 1863, il fonde la Croix-Rouge internationale et élabore les Conventions de Genève.
Pourtant ce fils de famille genevoise, banquier, homme d’affaires, colon en Algérie puis en Tunisie, reçu par tous les grands de ce monde, Prix Nobel de la Paix, un jeune journaliste suisse le retrouve en 1895 déchu, ruiné, tenu pour fou dans une petite ville d’eau alémanique…
C’est ce destin hors du commun que nous restitue cette biographie unique, celui d’un pionnier qui a inventé l’action humanitaire et dont le nom dut trop longtemps oublié par ceux-là mêmes qui prônent l’idéal qu’il a su réaliser.
fiction biographique. Editions Albin Michel, 2003.
Avec Cornelio Sommaruga, ancien président du Comité international de la Croix-Rouge
Réception du Prix de la Société Littéraire de Genève (2003)
La Croix
24 septembre 2007
« S’il m’a été donné d’accomplir la grand œuvre de la Croix-Rouge universelle, c’est pour avoir été désigné par le Très-Haut. A cela, je ne puis rien, si ce n’est Lui exprimer mon infinie reconnaissance de m’être trouvé là pour servir Son dessein, dussé-je payer cette élection, pareil au Christ, de la plus insupportable des disgrâces. »
Cette phrase tirée des Mémoires imaginaires d’Henry Dunant résume assez bien la personnalité qui se dégage de cette nouvelle biographie du fondateur de la Croix-Rouge. Profondément croyant, mais aussi mégalomane et terriblement orgueilleux au point de jouer systématiquement les grands seigneurs, quitte à se retrouver sur la paille.
Le Genevois n’apparaît pas aussi philanthrope que son action aurait pu le laisser croire. Il a démarré sa carrière comme homme d’affaires. C’est en cherchant des appuis chez les puissant de son époque (il voue un culte véritable aux têtes couronnées), qu’il rencontre Napoléon III, peu avant la bataille de Solférino.
Et si cette boucherie sera à l’origine de la création de la Croix-Rouge, c’est aussi parce que Henry Dunant, dépité par le refus impérial d’un appui pour son entreprise coloniale, cherchera un dérivatif.
Sa soif inextinguible de reconnaissance exaspère ses contemporains. Justice lui sera finalement rendue, mais au prix d’une très longue traversée du désert qui en fera un homme brisé.
C.R.
Scènes Magazine
Mémoires imaginaires, dans Scènes Magazine
On parle beaucoup d’Henry Dunant en ce début d’année, d’abord avec la pièce Dunant de Michel Beretti présentée à la Comédie au mois de mars et maintenant avec une biographie que lui consacre Serge Bimpage, parue récemment aux éditions Albin Michel. Il faut dire que la destinée de ce personnage si contradictoire offre une matière historique, dramatique et romanesque encore largement inexploitée. En adoptant la forme des mémoires imaginaires, le texte de Serge Bimpage plonge le lecteur dans la réalité intérieure de Dunant.
Habile stratagème littéraire, car le lecteur se trouve d’emblée aux prises avec un « je » qui s’adresse à lui naturellement pour établir une communication directe sur le mode de la confession. On pense immédiatement à Rousseau, à ses obsessions de justification, de réhabilitation. La suite du récit confirme cette impression et le « je » fictif se révèle comme un outil extrêmement efficace pour mieux exprimer la vérité intérieur du personnage. Ainsi une fois admise la substitution, on plonge avec Dunant dans le tourbillon de sa vie.
Serge Bimpage confesse volontiers les motifs qui l’ont amené à ce double « je ». Dès le départ de son projet biographique, l’auteur a acquis la conviction que Dunant, ceci dès sa plus tendre enfance, n’a jamais eu l’occasion de s’expliquer sur les divers échecs et épreuves qui ont jalonné son existence. Un déficit de communication qui s’enracine de façon particulièrement emblématique dans les relations défaillantes qu’il entretient avec un père absent.
Le désir de s’expliquer avec ce dernier sur des sujets familiaux et intimes ou sur des préoccupations liées à son avenir professionnel, à la religion, la politique ou l’économie, se heurte à un mur de silence. Le père vit sa vie du côté de Marseille où il gère des affaires peu rentables et fréquente des femmes, beaucoup de femmes. Les lettres que Dunant fils adresse au père expriment pathétiquement ce besoin. Depuis lors, les déficits explicatifs s’enchaînent, l’un des plus significatifs restant l’impossibilité de s’expliquer publiquement sur la formidable faillite de son projet colonial en Algérie, la Société financière et industrielle des moulins de Mont Djemila, qui mobilisa toute son énergie pendant quinze ans. Cette débâcle le condamne définitivement aux yeux de la bonne société genevoise.
Réappropriation de la parole
Dunant le visionnaire, Dunant le rêveur bâtit plan sur plan, puis les abandonne les uns après les autres parce qu’enlisé dans mille difficultés, alors il s’exile et se mure dans le silence. Il en va ainsi de la plupart de ses entreprises financières et humanitaires (y compris celle de la Croix-Rouge que son rival Gustave Moynier reprend à son compte et mène à son terme). Jamais cependant la parole ne sera donnée à Dunant pour s’expliquer, c’est la raison pour laquelle Serge Bimpage a voulu lui offrir cette opportunité posthume de s’exprimer, à travers le jeu rhétorique des mémoires imaginaires. Ainsi, grâce à cette réappropriation de la parole, nous écoutons la « voix » du Dunant contant ses mésaventures. Une voix littéraire, car les traces de cette parole ne subsistent que sous la forme de l’écriture.
L’auteur à cet égard place d’emblée et métaphoriquement son récit sous cette bannière ; ainsi dès les premières lignes Dunant, âgé de soixante-sept ans, exprime son besoin de dérouler le fil de sa vie pour par l’écriture, projet que, comme tant d’autres, il ne parvient pas à concrétiser lui-même. Usé par la vie, mal conseillé et en proie au délire de persécution, il tente en vain de mettre de l’ordre dans ses idées et les « Mémoires » qu’il a laissées restent un chaos inachevé. L’écriture de son autobiographie ne pouvait donc, dès le départ, que passer par l’entreprise d’un écrivain tiers. Dans un premier temps, ce relais autobiographique passe par Rudolf Müller, un jeune professeur d’histoire dont Dunant s’entiche, mais son inexpérience ruine l’entreprise. C’est Georg Baumgartner, rédacteur en chef à l’Osterschweiz, qui posera le premier jalon de cette rédaction impossible. Le journaliste rédige en effet en 1895 deux articles décisifs sur Dunant dont la presse internationale se fera l’écho et qui le feront sortir du néant de l’oubli.
Le salut par l’écriture
Dans l’une de ses intuitions géniales, Dunant avait pleinement conscience que l’écriture autobiographique serait salvatrice, même si elle devait passer par la main d’un autre. Il l’a d’ailleurs exprimé clairement de son vivant. Serge Bimpage a compris cette nécessité et celle-ci, dans son ouvrage, guide et justifie la parole fictive du protagoniste. La vérité historique n’en demeure pas moins intacte, car la voix imaginaire de Dunant est doublée par la voix de ses écrits. L’auteur cite de très nombreux passages de ses œuvres qui constituent une seconde matière littéraire enchâssée dans la première. Le lecteur découvre alors un espace textuel historique libéré des contraintes du genre, ce qui pourrait, on le conçoit, irriter l’esprit de scientifique des historiens. Mais le projet biographique de Serge Bimpage se situe sur un autre versant que celui de la quête historique stricto sensu. L’ambition de cet ouvrage est à rechercher dans le désir de restitution de cette « voix » jamais entendue, dans la compréhension de la réalité psycho affective d’un homme au caractère marqué tant par la lucidité que par la folie.
Au terme de ce récit, le mystère des ambivalences de Dunant demeure entier, notamment lorsqu’on découvre les magnifiques pages qu’il rédige à la fin de sa vie sur le pacifisme, la guerre, le militarisme, le capitalisme ou le féminisme. Mais, en même temps, ses paranoïas de persécution, d’isolement, de foi s’aggravent. Dunant, délaissant l’écriture, se met alors à peindre (dans un style d’art brut), des scènes bibliques retraçant l’histoire de l’humanité, de la Création jusqu’à l’Apocalypse. Un message divin selon lui : « J’utilise beaucoup le rouge… C’est la bataille de Solférino, le sang versé sur le champ de bataille, le rouge de la croix, le rouge du mal sur le blanc de la pureté, la tache de la colombe. ».
Si la voie autobiographique s’accomplit quelque part grâce au travail créatif de Serge Bimpage, la voie biographique, on le comprend, représente un vaste chantier. Jusqu’à ce jour, en effet, il n’existe toujours pas de biographie décisive sur Dunant, même si d’importantes recherches ont été menées, notamment par la Société HenryDunant de Genève. Il semble que la vie de Dunant se soit désormais figée dans une icône en forme de Croix-Rouge et l’on peut se demander si l’histoire est en mesure de la profaner, le cas échéant la fiction y pourvoira.
Françoise-Hélène Brou
Choisir
Moi, Henry Dunant, j’ai rêvé le monde, dans Choisir
Serge Bimpage, « saisi sans la moindre raison rationnelle » par le mystère Henry Dunant, par la nécessité de donner voix à son cri « lancé à l’humanité souffrante », nous dit sa découverte d’un homme. Un homme à la personnalité complexe, « intelligent mais naïf, ambitieux mais immature, séducteur mais maladroit, calculateur mais pas stratège, snob mais non prétentieux, cultivé mais autodidacte, effacé mais narcissique, attiré par l’argent mais généreux. Tout est dit.
En quelque 270 pages, Serge Bimpage « revit » Henry Dunant, explorant sa personnalité, ses enthousiasmes, ses exécrations, ses triomphes, ses échecs, le chrétien engagé, l’homme d’affaires, le brillant réalisateur, le failli honteux, l’homme de la cour, le clochard. L’intérêt ne faiblit jamais : de la rue des Granges à Saint-Gervais, de la petite Genève aux grands conflits européens, du pasteur Gaussen, animateur du Réveil, à Napoléon III, successeur de Charlemagne, des moulins algériens à Solférino, de la fondation de l’Alliance universelle des Unions chrétiennes de jeunes gens à la naissance de la Croix-Rouge, c’est toute la diversité d’une époque foisonnante évoquée au fils des pages.
Et l’auteur réussit à nous faire pénétrer au plus profond de la psychologie torturée d’un homme passant de l’euphorie à la dépression, des idéaux les plus élevés au « besoin d’appartenir à la classe patricienne ». Un homme qui se passionne pour la cause anti-esclavagiste et qui fait sienne un dit de Mme Girardin : « L’égalité, c’est l’utopie des indignes. » Un homme enfin qui s’enorgueillit de fréquenter les grands de ce monde et passe de longues années de sa vie dans l’obscurité et la misère.
Serge Bimpage ajoute à ces mémoires frémissantes, avec une copieuse bibliographie, deux utiles chronologies : celle de la vie d’Henry Dunant et celle des principaux événement de son époque. Dans sa postface, il interpelle, en deux lignes, trois générations de Genevois : « mort d’Henry Dunant en 1910 » ; « érection de son buste à Genève en 1980 ». Pourquoi tant d’années entre ces deux dates ?
Georges Tracewski
Lectures Magazine
Au chevet d’Henry Dunant, dans Lectures Magazine
Tout le monde sait aujourd’hui qu’Henry Dunant fut le fondateur de la Croix-Rouge. On sait moins l’énergie qu’il dépensa pour mettre sur pied son projet humanitaire qui ne nous ferait plus jamais voir les guerres de la même façon.
Mais ce qu’on ignore, c’est la mise à l’écart dont il fut victime avant que le Nobel de la Paix vienne, en 1901, célébrer ses acquis.
Grâce à Serge Bimpage qui a effectué un formidable travail d’historien, on peut retrouver l’homme isolé, en proie au doute. L’auteur a imaginé un dialogue avec un journaliste, qui nous donne l’impression de partager l’intimité de ce visionnaire hors du commun.
On côtoie, avec lui, les familles patriciennes genevoises, on croise Moynier ou Maunoir, mais aussi Victor Hugo, entre Napoléon et les banquiers privés genevois. Le ton est personnel, tantôt allègre, tantôt impertinent.
Le talent d’écriture de Serge Bimpage redonne vie au grand homme.
A dévorer comme un roman.
Serge Bimpage
Le Courrier
Moi, Henry Dunant, j’ai rêvé le monde, dans Le Courrier
Il arrive à point nommé, le livre de Serge Bimpage chroniqueur à la Tribune de Genève et auteur de plusieurs ouvrages empreints de mémoire, historique ou familiale. A l’heure où, en Irak, les armes font taire la diplomatie et craindre le pire au plan humanitaire, ces « mémoires imaginaires » d’Henry Dunant jettent une lumière inédite sur l’engagement têtu du fondateur du CICR. Cancre à l’école, homme d’affaire malheureux en Algérie, Dunant subit un choc le 24 juin 1859 lors de la bataille de Solferino, qui oppose Français et Piémontais.
Venu assister au « spectacle » de la guerre, il en conçoit au contraire une profonde aversion. Après avoir improvisé des soins d’urgences, pour les milliers de blessés laissés à l’abandon, Dunant le philanthrope se fait visionnaire : auteur en 1862 d’un vibrant plaidoyer humanitaire - Un souvenir de Solferino - il fonde la Croix-Rouge internationale en 1875, imagine les Conventions de Genève et reçoit en 1901 le tout premier Prix Nobel de la Paix. Dunant achève pourtant sa vie ruiné et malade dans un hôpital de Heiden, Appenzell, où il meurt le 30 octobre 1910, à 82 ans.
C’est à Heiden que Serge Bimpage fait débuter son livre, en 1867, par la rencontre entre le vieux sage et Georg Baumberger, un journaliste local. Moi, Henry Dunant, j’ai rêvé le monde est le récit à la première personne du parcours de Dunant, entre anecdotes personnelles et déclamations pontifiantes. L’intérêt est inégal, même si l’affection évidente de Serge Bimpage pour son objet et la verve idéaliste de celui-ci font surgir les images au fil des pages.
Comment rester insensible au pacifisme mêlé de pessimisme d’un Dunant qui, au soir de sa vie, rédige un pamphlet antimilitariste méconnu, L’Avenir sanglant, et prononce sous la plume de Serge Bimpage des paroles pour le moins prophétiques : « Notre civilisation tant vantée est désormais traversée par la barbarie dont le spectre m’est rien moins que la guerre universelle. »
Roderic Mounir
Construire
DUNANT et nous, dans Construire
Notre confrère Serge Bimpage s’est glissé dans la peau d’Henry Dunant, le fondateur de la Croix-Rouge, pour nous raconter son étonnant parcours. Il publie « Moi, Henry Dunant, j’ai rêvé le monde ».
Un livre de chevet, au style attachant, le tout dernier du grand journaliste, écrivain, essayiste, Serge Bimpage :Moi, Henry Dunant, j’ai rêvé le monde, Editions Albin Michel. Que de recherches, de documentation, pour nous relater l’étonnant parcours du fondateur de la Croix-Rouge Internationale, (1818-1910), Prix Nobel de la Paix en 1901, qui après avoir rêvé un autre monde humanitaire, finit sa vie blessé, ruiné, oublié de tous.
L’auteur qui s’est glissé dans la peau de cette figure emblématique, fait parler dans son livre Dunant lui-même, à la première personne. C’est ce destin hors du commun que nous restitue cette biographie unique, que le lecteur suit avec passion. Un livre instructif, dans l’air du temps…
Jean-François Duval
Prestige
Henry Dunant vu par Serge Bimpage, dans Prestige
Un livre de chevet, au style attachant, le tout dernier du grand journaliste, écrivain, essayiste, Serge Bimpage :Moi, Henry Dunant, j’ai rêvé le monde, Editions Albin Michel.
Que de recherches, de documentation, pour nous relater l’étonnant parcours du fondateur de la Croix-Rouge Internationale, (1818-1910), Prix Nobel de la Paix en 1901, qui après avoir rêvé un autre monde humanitaire, finit sa vie blessé, ruiné, oublié de tous.
L’auteur qui s’est glissé dans la peau de cette figure emblématique, fait parler dans son livre Dunant lui-même, à la première personne. C’est ce destin hors du commun que nous restitue cette biographie unique, que le lecteur suit avec passion. Un livre instructif, dans l’air du temps…
Salwa D. Tohmé
la Tribune de Genève
Serge Bimpage décroche le Prix de la Société littéraire, dans la Tribune de Genève
Le journaliste et écrivain est récompensé pour sa biographie du fondateur de la Croix-Rouge.
En mai sortait Moi, Henry Dunant, j’ai rêvé le monde de Serge Bimpage. Il s’agissait d’une biographie, écrite à la première personne, du fondateur de la Croix-Rouge. Autant dire que les faits, tous vérifiés, subissaient une interprétation sinon romanesque du moins… interprétative.
Publié à Paris par Albin Michel, le livre vient d’obtenir le Prix de la Société littéraire de Genève. Il sera remis à notre collaborateur le 22 octobre dans les somptueux salons que l’association, fondée en 1815, occupe au 19 de la Corraterie. « Je suis très flatté de ce choix », explique le lauréat. « Une vénérable société composée de vénérables distingue un sujet longtemps resté polémique à Genève. Il aura fallu un siècle pour que la ville digère les initiatives d’un homme qui la dérangeait. »
Ce sont les jurés qui font eux-mêmes leur marché. Ils choisissent les différents ouvrages, parmi lesquels un seul se verra peut-être couronné. Le prix n’a pas été remis en 2002. Cette année, 22 titres se trouvaient en lice. « J’ai été invité par le jury. Il estimait qu’il s’agissait d’une bonne cuvée. Je me retrouve en compétition avec Catherine Safonoff. »
L’Henry Dunant s’est vu bien accueilli dans la presse. « Je n’aurais jamais espéré autant d’articles, de La Croix à La Quinzaine littéraire. » Côté ventes, tout reste en revanche flou. Il faut entre huit mois et un an pour les comptes. « Albin Michel m’a cependant demandé quelles corrections j’aurais apporté pour une réédition. » En attendant, Serge Bimpage écrit. Ce sera cette fois de la fiction pure.
Etienne Dumont
L'Hebdo
La légende de Dunant, dans L’Hebdo
Qui était vraiment le fondateur de la Croix-Rouge ? Le journaliste genevois Serge Bimpage a mené l’enquête. Résultat confondant.
On a tous en tête l’image d’Henry Dunant assistant à la bataille de Solferino où agonisent soldats français, italiens et autrichiens et décidant derechef de créer une organisation qui soulagerait les blessés. Dunant écrit « Un souvenir de Solferino », qui aura un énorme retentissement. La Croix-Rouge est fondée en 1863, les Conventions de Genève élaborées. Pourquoi diable, alors, Dunant se trouve-t-il en 1895 dans une petite ville d’eau appenzelloise, ruiné, déchu, tenu pour fou ? Un autre genevois, le journaliste et écrivain Serge Bimpage, a mené l’enquête. « Moi, Henry Dunant, j’ai rêvé le monde », est une courageuse autobiographie imaginaire. A travers un engagement très personnel de l’auteur, Dunant raconte ce que fut sa vie, loin de l’image d’Epinal retenue par la postérité.
Le livre se situe en 1895. Dunant rencontre Georg Baumberger, reporter à „Die Osterschweiz“. Baumberger va sortir Dunant de l’oubli où il se trouve depuis des années, « fuyant l’humanité ». « J’ai trop exigé d’elle »,écrit Bimpage-Dunant, d’après les Mémoires que Dunant écrivait au moment de mourir. Son esprit crie justice, sa paranoïa dénonce « la splendide indifférence de l’humanité à l’égard de ce que j’ai fait pour elle. » Cinq ans après, en 1901, il reçoit le premier Nobel de la paix. Il meurt en 1910.
C’est une image de Dunant étrange qui se dégage de ces « Mémoires » fictifs. Le personnage est torturé, prétentieux, amer, exigeant, colérique, insatisfait. S’il va à Solferino, c’est surtout pour que l’empereur donne un coup de pouce à ses affaires.
« Il y a un gouffre entre l’image- l’icône que l’on forge d’une personnalité et – sa réalité de chair, j’ai payé de mon exil pour le savoir. »
Captivant.
Isabelle Falconnier